C’est l’histoire d’un shooting photo pas comme les autres. En début d’année, le webzine Daily Mars s’approche du Biennois Sébastien Gerber et lui demande s’il accepterait de réaliser un projet photographique autour des séries télévisées. Graphiste de profession, photographe, réalisateur de clips, chanteur au sein d’un groupe de Hardcore (SXOKONDO), Sébastien est également un cinéphile doublé d’un sérivore averti. C’est donc sans hésitation qu’il accepte ce projet dans lequel il voit l’opportunité de conjuguer ses passions.
Assez rapidement, il décide de revisiter l’univers de l’une de ses séries préférées qui s’avère également l’une des plus marquantes de l’histoire de la télévision: Twin Peaks. Le feuilleton créé par David Lynch et Mark Forst au début des années 1990 (et dont la troisième saison est actuellement en tournage) est bien connu pour son ambiance et son identité visuelle unique. Tous les spectateurs qui sont un jour tombés sur un épisode se souviennent forcément de la fameuse femme à la buche, du policier adepte de café noir et de donuts ou de la chambre au rideau rouge dans laquelle se trémousse un nain.
Sébastien Gerber a donc réunit une poignée d’amis pour réaliser la première partie de son shooting. Son idée était de ne pas tomber dans la parodie ni le décalque facile afin de «créer des image reconnaissables pour les amateurs de la série, mais qui pourraient aussi vivre d’elles-mêmes, sans êtres écrasées par la référence à tout prix». Pour se faire, la bande de copains s’est rendue un beau dimanche d’avril à l’étang de la Gruère avec quelques accessoires sous le bras: un vieux fusil de chasse, un bâche en plastique et quelques costumes. Ils ont ainsi pu mettre en scène la découverte du cadavre d’une jeune femme enroulé dans bâche transparente (rappelant donc instantanément le corps de Laura Palmer, découverte lors du premier épisode de la série).
Malheureusement pour Sébastien et ses modèles, un des nombreux promeneurs qui passaient par là, certainement encore marqué par la tuerie de Charlie Hebdo, a mal interprété la mise en scène et a appelé la police, signalant un homme armé en train d’abattre une femme. La police a alors immédiatement déployé son groupe d’intervention: des hommes en tenue de combat, équipés de boucliers et de fusils d’assaut.
Après avoir été tenus en joue et menottés, les «suspects» ont pu expliquer le malentendu à la police, qui a tout de même saisi une bonne partie du matériel, dont les appareils photo et la pellicule.
Malgré leur mésaventure, Sébastien et ses amis ne se sont pas laissés décourager et ont attaqué la deuxième partie du shooting le week-end suivant, en étant obligés cette fois d’emprunter du matériel, ce qui explique le changement de ratio entre les clichés pris à l’étang de la Gruère et ceux en intérieur.
Cinq mois plus tard, le temps de faire développer les photos et de recevoir une amende bien salée pour «agissements ayant provoqué la peur et l’effroi» et «conduite inconvenante», Sébastien a révélé le fruit de son travail (et de ses émotions). Intitulé The Lodge, le projet compte 28 images au total, des portraits pour la plupart. Des photographies au cadrage soigné, toutes parfaitement éclairées et dont se dégage une ambiance qui rappelle instantanément la série de David Lynch et Mark Forst. Un travail que nous vous proposons de découvrir en intégralité sur le site de Sébastien Gerber.