Un jambon cuit à l’étouffée
Rome ne s’est pas faite en un jour. Une Miss Suisse non plus. Il suffit de jeter un coup d’oeil aux concours de Mini Miss. Et oui, si on veut avoir une chance de se démarquer sur le rayon mortadelle, il est recommandé de travailler son trait de mascarade le plus tôt possible. Devenir Miss est un travail de longue haleine et ne s’improvise pas. Prédestinée aux podiums, la Miss va donc devoir passer pas mal de temps à suer dans une salle de sport. Elle va même réussir à nous faire croire que c’est pour son équilibre, pour se sentir bien. Le sport, a way of life. Ne soyons pas dupes, on se débarrasse du superflu et on va à l’essentiel. On ne garde que le meilleur, les abats c’est pour les cervelas. Le processus d’inscription passe par un questionnaire, sorte de hachoirs pour steak haché sous-vide et sans saveurs. On ne fait pas dans le local, on standardise les pièces. Entre les traditionnelles questions de mensuration et de couleur de cheveux, la Miss en devenir à quand même l’occasion de prouver que son physique passe en second plan. Une question, «A tes yeux, que signifie la beauté?» et trois lignes pour nous faire croire que la beauté est avant tout intérieure. Un véritable jambon en croûte qualité Nyffeler.
Du pain et des jeux
Une fois la sélection effectuée, la crème de la crème se retrouve dans l’arène afin de s’affronter en face à face, comme des dures. Mais ça on ne le voit pas. Tout ce qui filtre à travers les réseaux sociaux, ce sont des moments de joie où les jeunes femmes sont copines comme cochonnes. Car oui, il est fini le temps où tout se joue le temps d’une soirée à la télé avec Jean-Marc Richard ou Geneviève de Fontenay. Désormais, la vie des jeunes femmes s’affiche en continu dans le flux de nos réseaux sociaux. Ça twitte, et ça poste de photos à tire larigot. La recette de cette farce n’est bien sûr pas exhaustive mais l’on retrouve régulièrement une pincée de shootings photos pros, une louche de selfies douteuses, une cuillère à soupe de Healthy Food et énormément de conneries. Les couteaux s’aiguisent et la tension monte. Comme un cochon de lait que l’on arrose régulièrement, les demoiselles s’aspergent de l’Oréal, sponsor du festin. Car elles le valent bien, dans quelques semaines la viande sera tendre et savoureuse, même à travers un écran de télévision.
A point, saignant ou bleu la cuisson?
L’heure du repas a sonné, les paires de Wienerlis sont alignés devant les yeux béats. Le soufflé tient bon. Ces jeunes femmes se battent pour de nobles causes. Néanmoins, l’humanitaire a du plomb dans la culotte. Sauver les enfants leucémiques et les ours blancs c’est fini. Désormais on se bat pour sensibiliser les gens à la responsabilité sociétale des entreprises (comprendre: encourager le capitalisme avec une étiquette verte et un salaire mininum d’enfant chinois), c’est bien plus mainstream et ça rapporte plus. Le défilé en bikini comme dernière bouchée indigeste, il est l’heure de passer à l’addition. La Miss au plus beau boudin gagnera le droit de défiler dans le centre Manor de Marin et aura l’occasion d’exhiber ses vacances en page 13 du Matin. Il y en a un peu plus, je vous le mets quand même?
On a tendance à dire que dans le cochon tout est bon, mais j’ai bien l’impression que l’auteur de cet article n’a gardé que le meilleur. Au diable ces concours, vive la viande, la vraie, la bonne! Espérons qu’un jour ces exhibitions malsaines derrière des vitrines salies par les doigts des consommateurs finissent par s’en aller en eau de boudin, et qui sait, disparaissent à jamais!