Le renégat des routes
La route ne nous appartient pas, c’est sûr. C’est un lieu de partage, de respect (haha!) et de sécurité pour autant que l’on respecte son code. C’est oublier qu’il existe un renégat, celui qu’on n’a pas vu venir dans son rétroviseur. Alors que l’autoradio vibre aux sons du dernier Stromae, arrive d’on ne sait où un bruit assourdissant envahissant tout l’habitacle. «Mais bonté divine! Qu’est-ce que c’est que ce vacarme!». La silhouette surgit et disparaît au même instant, laissant le conducteur de la Citroën comme planté sur place. Sur nos routes, les chevaux et leurs crottins ont laissé la place à de nouveaux destriers pas forcément plus propres. Munis de leurs armures de compète arborant les numéros de leurs héros des circuits, les motards ont le don d’énerver l’automobiliste du dimanche. Ces animaux, pas assez rares pour certains, vivent en meute ou en horde selon l’odeur. Le P’tit Ju a eu l’occasion d’approcher des locaux pour comprendre leur mode de vie.
Equus caballus mechanicus ou Moto club 46
Dans la région, on peut trouver un groupe de ces mordus du deux roues. 60 spécimens, de 20 à 60 ans, tous autant différents les uns que les autres. Du Fastus et Furius au Galopus tranquilus sans oublier le Modulus Velocitas. Cette horde se veut très joviale et ouverte à quiconque a le poignet droit qui démange. Majoritairement composés de mâles, nous avons pu approcher un spécimen féminin. L’envie de parcourir les verts prés d’ici et d’ailleurs l’a motivée à les rejoindre. Après une adaptation à l’odeur de benzine et leur mode de communication composé de cliquetis et de vrombissements, voici ce qu’elle a pu nous transmettre : «Longtemps, j’ai été passagère, appréciant la sensation de liberté qu’offrait cette chevauchée. J’ai décidé de m’y mettre. Ça m’avait l’air facile, comme un vélomoteur en gros». Bien mal lui en a pris de comparer le poney du Siky Ranch aux magnifiques Frison (ndlr race de cheval utilisée comme monture de guerre puis pour les courses de trots). Résultat, la pauvre s’est retrouvée sous son destrier qui, et elle s’en souviendra longtemps, pesait un peu plus lourd que son vélomoteur. Autrement, elle nous raconte que les échappées en horde ne se déroulent pas forcément comme prévu. A vouloir chercher l’herbe plus verte chez les voisins francophones, la sortie a bien failli se terminer à dormir sous un banc. La technologie GPS n’est pas forcément l’amie de l’Equus caballus mechanicus.
Le mâle Alpha
Dans toute bonne horde, il y a un mâle comme patriarche. Fondateur de la horde 46 avec quelques amis, il nous explique d’où est venue l’idée de ce rassemblement. «Il est un étalon légendaire, parcourant les circuits les plus sinueux avec audace et vélocité. Nous rêvions de pouvoir chevaucher avec lui. On l’appelle «Il Dottore» ». De cet amour pour l’asphalte, des courbes délicieuses et de l’estime pour cet étalon, ils décidèrent de créer ce club arboré du chiffre 46. Chiffre qui, selon la rumeur, serait lié aux conquêtes du mâle Alpha. On n’en saura pas plus là-dessus. Il est évident que cette meute est bien plus docile et respectueuse du code de la route que les loups solitaires que l’on rencontre à la sortie des gorges de Court. D’ailleurs, ces spécimens ne sont que peu présents, voire absents au 46. Toutefois, si l’Equus caballus mechanicus du 46 veut titiller la zone rouge du cadran, il s’en va dans les pâturages sans vache ni veau pour freiner son allure. Ou alors, passe la frontière pour apprécier les quelques 10km/h en plus que nos voisins autorisent. Cette fourchette tient à cœur au mâle Alpha: «La différence est impressionnante et rend l’évadée d’autant plus palpitante.» On a bien compris, le trot dans la Prévôté ça ne vaut pas le galop furieux dans la forêt noire, surtout s’il est accompagné de bons vivants et de boute-en-train.
www.motoclub46.ch
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