Vingt ans, c’est un âge ingrat, une période difficile, un cap à franchir et pas toujours avec les honneurs. Et pourtant, la 20e édition du Chant du Gros au Noirmont a négocié son virage tel un pilote de F1 dans une chicane. Le festival franc-montagnard a su passer, en quelques années, du char à foin à la grande scène, en conservant son côté atypique qui à fait son charme et sa réputation dans toute la Suisse.
Pourtant qui aurait parié il y a vingt ans à part un Taignon comme le Gros Louis, propriétaire du champ qui donna son nom à la manifestation, qu’un festival au mois de septembre et à 1000 mètres d’altitude aurait un tel succès? Y sont fous ces Noirmonts!
La grosse édition
Cette année particulièrement, le Chant du Gros mérite amplement son nom puisque cette édition aura été celle de tous les records. Et ce dès l’ouverture du festival avec une affluence jamais encore égalée pour un jeudi, de 7000 personnes qui se sont entassées sous le chapiteau de la grande scène pour écouter, entre autre, Louis Bertignac, ex-guitariste du groupe mythique Téléphone, Ben l’Oncle Soul ou encore l’intrepassable Jimmy Cliff et sa remorque de tubes.
Mais les prouesses de cette édition 2011 ne s’arrêtent pas là puisque les deux soirs suivants, soit le vendredi et le samedi, annonçaient déjà sold-out dix jours avant le début du festival. Du jamais vu en terre franc-montagnarde.
C’est au total pas moins de 27’000 personnes sur les trois soirs, qui ont été célébrer le passage à l’âge adulte du «Chantdu», qui n’a désormais plus rien à envier à ses grands cousins de Suisse romande.
De plus, et c’est à souligner, la météo a grandement contribué à cette cascade de records, puisque les «Chantdugrouistes» ont bénéficié de températures pour le moins estivales pour un mois de septembre.
Quand tout le monde s’y met, c’est fou ce qu’on arrive à faire quand même!
Du gros son au Noirmont
Le moins qu’on puisse dire, c’est que le comité d’organisation du Chant du Gros, 20ème édition a mis les bouchées doubles, les petits plats dans les grands, bref, a fait péter le budget pour faire venir des têtes d’affiches dignes de ce nom. Dans le désordre et de manière non-exhaustive, Louis Bertignac, The Australian Pink Floyd, Jimmy Cliff, Uriah Heep, Akhenaton, ou encore les régionales de l’étape, Fou, Kiki Crétin et les Talus.
Certains petits malins remarqueront sans doute que je n’ai pas mentionné le grand, le beau, le richissime Yannick Noah, pourtant tête d’affiche No1 de cette édition… J’y viens, patience.
Avec des goûts et des couleurs pour chacun, tout a été mis en œuvre pour que tout le monde y trouve son bonheur ce qui, si je ne m’abuse, est la recette de tout bon festival. Certes, certains, tel que moi, ne pourront s’empêcher de distiller quelques remarques, il va sans dire constructives, sur la prestation de quelques groupes.
Ainsi, dans les grosses réussites du week end, je retiendrai la performance inoubliable de Christophe Meyer, dit «Le Fou», qui, de retour vingt ans après la première édition, a prouvé encore une fois, qu’il n’avait pas volé, et de loin pas, son surnom. Devant une foule immense de fans de la première heure, Fou a repris, «en cœur» avec son public, pendant plus de deux heures, tous les tubes qui ont fait sa légende jurassienne. De peur de laisser son public sur sa faim, «le Fou» s’est offert une petite session d’escalade sur les structures des projecteurs, histoire de mettre définitivement, si besoin est, tout le monde d’accord. Un concert d’anthologie!
A l’inverse, la prestation de la personnalité préférée des Français, j’ai nommé Yannick Noah, a été des plus insipide. Tantôt ennuyant, tantôt énervant, M. Noah nous a gratifié de deux heures de concert gonflants. En commençant son show par la projection sur écran géant, de gigantesques photos de lui, c’était déjà mal parti! Mais là où le concert bascule, c’est lorsque Monseigneur Noah décide de s’offrir un petit bain de foule. Sur le papier, ça à l’air sympa comme ça qu’une star descende se mêler aux petites gens. Mais le problème, c’est qu’un bain de foule de quasi trente minutes, c’est long, très long, trop long, quand on poiraute devant une scène vide.
Dans le genre mégalo, j’ai rarement vu mieux!
De quoi devenir gros…
Trèves de critiques constructives, après toutes ces émotions, il faut bien manger un petit quelque chose pour se remettre. Et pour ça aussi, le «Chantdu» a fait très fort, une fois de plus, puisque le choix était on ne peut plus vaste pour ripailler sur les terres du Gros Louis. En même temps, avec un nom pareil, on ne s’attend pas à manger des petites graines, me direz vous! Certes, mais la particularité, c’est qu’au Chant du Gros, se remplir la panse n’a jamais autant aidé autrui.
Ainsi l’on découvre une multitude de petits stands de restauration qui proposent des plats typiques des quatre coins du monde. De l’Afrique à Asie, en passant par la Suisse, voyager n’a jamais autant fait grossir.
C’est par exemple l’association Ecole de l’Espoir qui s’occupe entre autres de construire des écoles en Afrique et qui propose de succulents Spätzli maison accompagnés d’une viande en sauce délicieuse. Ou encore l’inimitable Albertine (Miam-Miam Muka), petite Rwandaise habituée du festival depuis trois ans maintenant, qui cuisine, toujours avec le sourire, les spécialités de son pays. De quoi se remettre largement d’un concert de Yannick Noah, du moins pour une heure ou deux.
Enfin bref, vingt ans ont passé et force est de constater que ce rude gaillard de festival franc-montagnard a bien grandi. Espérons qu’il ne grandisse pas trop non plus, de peur de perde son charme si typique de notre joli coin de pays auquel on tient tant.
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